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Voyage au coeur des sources hydrothermales

Par Romain Bourboulou - Le 29 mars 2013

Depuis maintenant cinq saisons, l’UPMC (Université Pierre et Marie Curie – Paris 6) nous invite lors de ses conférences sciences à cœur à découvrir le travail de ses chercheurs. On y parle aussi bien de robotique, de chimie, d’astrophysique que de mathématique. Lors de cette rencontre, la biologie était à l’honneur pour nous faire découvrir le monde méconnu des fonds abyssaux. Juliette Ravaux et Bruce Shillito , membres de l’équipe d’Adaptation aux Milieux Extrêmes (AMEX) furent nos guides à travers ces lieux peuplés de fumeurs noirs et d’une faune intrigante.

Commençons par situer notre futur sujet de discussion. Les sources hydrothermales se trouvent au niveau de dorsales océaniques. Nous sommes entre 500 et 5000m de fond. L’activité volcanique est intense, elle fragilise la croûte océanique et forme des fissures où l’eau de mer abyssale se faufile allègrement. Cette dernière, au cours de son parcours sous-terrain, chauffe, se charge de différents métaux (fer, manganèse, plomb,..), d’éléments réduits comme de l’hydrogène sulfuré, le dioxyde de carbone ou du dihydrogène. Un fluide acide, anoxique et chaud (environ 400°C) sort ainsi par des cheminées pouvant aller jusqu’à 20m de hauteur, formant une fumée noire formée par la précipitation des minéraux au contact d’une eau plus froide (2°C).

Ces conditions, à première vue , semblent être le reflet d’un véritable désert biologique. Cependant des découvertes effectuées depuis la fin des années 70 mettent en évidence de nombreuse espèces endémiques. Ces écosystèmes synthétisent leur matière organique en absence de lumière grâce à l’oxydation de composés chimiques présents dans le fluide et trouvent des parades à chaque condition extrême considérée précédemment comme une barrière à la vie.

L’une des espèces les plus emblématiques de ces lieux est Alvinella pompéïana, le ver de Pompéï un annélide polychète ayant les meilleurs capacités de thermo tolérences connues à ce jour. Il vit avec une température environnante d’environ 50°C en permanence. Malgré cela, cet organisme est fragile, son étude est très complexe à réaliser in vivo. Et il n’avait, jusqu’en 2012, pas réussi à être ramené vivant en surface, notamment à cause de la décompression, afin permettre son observation en laboratoire. Pour répondre à cette problématique, l’équipe de l’AMEX a travaillé sur la création d’un système de prélèvement qui permettrait de garder les organismes dans un environnement pressurisé jusqu’à leur émersion : le projet BALIST. Ce dernier se compose d’un dispositif d’extraction ressemblant fortement à une bouche de crocodile (d’où son surnom) qui va ensuite déposer l’échantillon prélevé dans un conteneur cylindrique (PERISCOP) équipé d’un hublot d’observation qui gardera son contenu sous pression. Il a permis , entre autre, à l’issue de la mission MESCAL 2, de définir la limite haute à la vie sur des vers de Pompeï (environ 50°C).

alvinella

Maintenant une dernière question se pose. Il est bien intéressant de se torde en quatre pour les obtenir mais il semble nécessaire de pouvoir les conserver dans un environnement adapté une fois arrivé à la surface. Cette mission était dès son commencement en partenariat avec l’IFREMER et l’aquarium Océanopolis de Brest, et avait un dessein de diffusion de culture scientifique en plus de celui de recherche pure. Certains des organismes abyssaux ( les moins sensibles : crevettes et crabes) etaient destiné à être exposé dans un aquarium de l’Océanopolis de Brest. Abyssbox est un aquarium cylindrique composé d’environ 600kg d’acier d’un seul hublot de 15cm de diamètre  et contient seulement 16L d’eau . Ceci peut sembler peu, mais à la vue des condition requises pour conserver ses habitants : la pression exercée sur le hublot correspond au poids de trois Airbus A320, il représente un bel exemple de technologie au service du public. Ces lieux d’observation ne se contentent pas d’exposer, ils permettent aux équipes sur place d’avoir un aperçu des cycles de vie des espèces au quotidien. Un cycle reproductif à déjà été observé et semble se profiler pour un futur proche ( le premier n’ayant pas abouti à cause de la difficulté à gérer des larves).

abyssbox 2

Ces travaux nous éclairent un peu plus sur les écosystèmes abyssaux, tous différents et infiniment riches. Chaque fausse a son écosystème propre, et la diffusion ainsi que la colonisation de ces milieux restant à l’étude. Ils restent cependant un exemple surprenant de la flexibilité biologique.

Sources

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